Aleerah a toujours sur elle un pistolet, coincé dans ses vêtements et attaché par une chaîne à sa cheville. Cette arme est comme un double d'elle. La Paresse connaît cette arme mieux qu'elle se connait elle même. Elle possède aussi une dague, en cas d'urgence, contre sa cuisse.

Un léger souffle sous le soleil de plomb de l'été, un gémissement endormi. Vous vous dirigez vers son son si inhabituel en pleine journée et apercevez une jeune femme allongée sous le couvert d'un saule pleureur. Malgré les feuilles qui vous empêchent un peu de la regarder à votre gré, vous restez au même endroit car vous avez peur de la réveiller. Elle bouge dans son sommeil et vous pouvez apprécier ses formes douces, pas encore adultes. Sa poitrine se soulève à un rythme régulier et vous êtes momentanément attiré par le galbe de ses seins, les hommes son incorrigibles ! Vous clignez des yeux, secouez la tête et continuez votre observation vers ses jambes longues et fines.

Vous n'aviez pas remarqué, mais depuis un certain temps, Aleerah avait ouvert les yeux et elle se releva d'une lenteur qui vous parait exagérée. Elle passe sa main dans ses cheveux, qui assise, frôlent le sol. Leur couleur vous interpelle, d'un bleu turquoise vif. C'est dommage que vous ne puissiez pas voir ses yeux car ils sont de cette même couleur si envoûtante. Elle prend un élastique qui trônait autour de son poignet et fait une queue de cheval rapide, remontant un peu ses cheveux. Elle finit par se relever, tournant sur elle même pour retrouver sa robe qu'elle avait retirée pour se reposer. Ne vous cachez pas, je vous ai vus baver. Elle l'enfile sur son corps blanc, puis se retourne. Elle plonge son regard dans le votre, elle n'a pas l'air surprise, elle se dirige vers vous, pousse les branches qui tombent devant vos yeux et dépose un baiser sur votre joue avant de partir, marchant tranquillement.
Vous vous retournez sur son passage et clignez des yeux, incrédules. Elle a déjà disparu, vous avez l'impression que ce n'était qu'une illusion...

En parlant d'illusion... En plus d'être maître des ombres, Aleerah a le pouvoir de créer des illusions. Elle s'en sert beaucoup comme arme de défense, mais elle peut aussi l'utiliser pour embêter les personnes qu'elle rencontre, un rien peut l'amuser. Aleerah aime beaucoup ce pouvoir, il ne lui pèse pas sur la conscience et ne lui fait pas de mal. Elle n'a qu'un seul inconvénient, c'est que ce pouvoir lui prend de l'énergie et si elle l'utilise trop, elle finit par s'endormir dans un sommeil profond et réparateur.

Aleerah est la pire des manipulatrices, elle utilise son pouvoir à tord et à travers pour prendre son pied. La gentilesse a déserté son âme juste après son enfance. Elle n'aime pas aider les gens, la solidarité n'est pas une chose qu'elle applique. Le seul point que l'on pourrait noter de positif dans son caractère est la loyauté pour son gang et sa famille, c'est un crédo pour elle et elle ne l'a, pour l'instant jamais brisé. Aleerah peut être la plus vile des personnes comme en paraître la plus gentille, à l'écoute. La petite ou la grande sœur de tout le monde. Mais ce n'est qu'un masque, encore un moyen de manipuler les gens, de les soumettre à sa bonne volonté. Vous ne me croyez pas ? Alors écoutez ça. Vous avez tous eu une amie, une confidente. Elle vous a écouté lorsque vous alliez mal et vous vous sentez maintenant redevable envers elle. Aleerah utilise ce sentiment afin de tirer les ficelles de votre vie. Le Péché Capital de la Paresse agit sur son caractère en faisant d'elle un pacha, quelqu'un de lunatique (on dit souvent que la fatigue exacerbe les émotions).
En bref, Aleerah est imprévisible, on ne sait jamais quand elle joue ou quand elle est sincère. A part dans un seul cas, lorsqu'elle est avec Caleb, elle ne peut lui mentir, jouer avec lui. Il est son chef, son ami, son frère, elle l'aime et ne fera jamais rien qui pourrait lui faire de mal.

- Raconte moi encore ton histoire Al'. S'il te plaiiiiit !

Aleerah tourna sa tête vers la petite fille et sourit.

- Je te l'ai déjà racontée un million de fois...

La petite fille fit une moue triste.

- Alleeeeeez !

Aleerah pencha la tête sur le côté.

- D'accord.

~o~

Je n'ai pas de souvenirs de ma petite enfance, mais mes parents m'en ont souvent parlé. Ce n'est pas très intéressant ...

- Raconte !

Mes parents pensaient que je n'étais pas un enfant normal, je ne pleurais presque jamais et quand je pleurais, juste après je me mettais à rire... Mais ça ne n'est pas important. J'ai toujours vécu dans la rue.

- Mais tu n'avais pas de maison ?

Je n'avais pas de maison à moi, on dormait la plupart du temps avec des amis dans des bâtiments abandonnés. Je ne me suis jamais sentie vraiment différente, ou pauvre. Je pense même que j'ai eu une enfance privilégiée. Je n'étais pas vraiment très proche de mes parents, nous étions tout un groupe, mais j'étais leur fille unique. J'ai grandi avec la rue, ses caprices, ses révoltes, mais aussi sa facilité de vivre. Là bas on ne se souciait pas du fait que Monsieur Machin-Chose était à la mode, nous on s'amusait à faire des dessins sur les affiches qui le représentaient.

- Et ensuite ?

Ensuite j'ai grandi et je me suis émancipée, j'ai quitté mes parents, ma famille et ai décidé de rejoindre mon propre gang. C'est là que j'ai rencontré Caleb, je l'ai tout de suite trouvé très beau et charismatique. J'étais jeune, je suis même tombée amoureuse de lui, d'un amour de gamine bien sûr. On est vite devenus proches et c'est là que j'ai vu tous ses défauts. Malgré cela il est et restera toujours mon ami, mon grand frère. Je connaissais toutes les rues de la ville par cœur, c'est pourquoi je fus assignée au repérage des cachettes du gang. Je connaissais tout le monde mais personne ne parlait de moi, j'étais donc invisible ... comme une illusion...

- Et comment est-tu arrivée ici, à OtherSide ?
- Ah ! Comment je suis arrivée ...

J'étais avec le gang à ce moment là et on se battait contre nos ennemis malheureusement, nous étions en sous-nombre par rapport à eux et ils nous faisaient perdre beaucoup de terrain. Au bout d'un moment nous nous retrouvâmes coincés devant un lac. On aurait pu plonger et nager, mais ça supposait que l'on tourne le dos à nos assaillants et ce n'était pas vraiment la chose à faire. Mais on dût se résigner et se tourner vers l'eau miroitante et là quelque chose d'étrange se passa. Nous étions comme figés devant notre propre reflet, les balles ne nous atteignaient plus, tout ce qui était autour ne nous touchait plus. Pour ma part je crus que c'était une illusion, car la femme que j'eus sous mes yeux avait l'air bien plus belle et jeune que moi. Mais c'était bien moi ... avec des cheveux bleus. Comme mus par je ne sais quelle force, nous nous sommes tous penchés en avant, jusqu'à toucher l'eau, la traverser même. Bizarrement, nous ne nous sommes pas retrouvés sous l'eau...
C'était comme si on était passés de l'autre côté de notre reflet, de l'autre côté du miroir. On était tous différents, je pense qu'on s'est tous sentis bizarres. Pour ma part j'étais perdue, je me posais beaucoup de questions, où étions nous ? Qu'était-ce lieu. Qu'en était-il du monde que l'on venait de quitter ?
De nombreuses questions qui ont eu leurs réponses au fur et à mesure de mon parcours ici.

- Et tu regrettes ?
- Mais pas du tout ! Je t'adore !